mardi 29 mai 2012




Un quichotrain pour Quichottine

Quarante-huit ans cet été que je me suis embarquée dans le train de la vie. J’ai donc pris un train de mesures, afin de ne pas manquer le train. Même si je n’ai pas mené un grand train de vie, je n’ai pas non plus, ainsi qu’une vache dans le champ, regardé passer le train.

J’essaie chaque jour de me lever avec entrain, même si parfois il me faut me botter le train. Ma mise en train, je la fais avant le petit-déjeuner, ainsi le reste de la journée va bon train.

Certains jours, je sors mon train d’artillerie pour faire le train de maison et y aller à fond de train dans les travaux nécessaires.

Et d’autres jours, c’est le diable et son train, je ne me sens pas du tout dans le train. Mais même ces jours-là, avec un peu d’effort, petit train va loin.

Vous ne me verrez jamais en train de faire le pitre, mais à l’occasion, je peux être un boute-en-train.

Ces jours-ci, on me demande de faire du train, car au train où vont les choses, il faut surveiller son arrière-train.

mercredi 23 mai 2012

Printemps érable




Printemps érable

En faisant ma marche ce matin, passant devant le dépanneur, des gens discutaient de la situation que nous vivons depuis trois mois. Ils ne semblaient pas trop savoir au juste les enjeux réels de ce conflit, pas plus que moi d’ailleurs.

J’ai du mal à plaindre ces étudiants parrainés par les syndicats et à approuver ce gouvernement au pouvoir depuis trop longtemps et qui semble dépassé par les événements.

Dans la grande manifestation d’hier, des artistes de ma génération disaient sentir revivre en eux une flamme éteinte depuis longtemps. Mais pour retrouver cette ardeur, il me manque un vrai leader avec une bonne équipe. Ce ne sont pas les politiciens des autres partis qui font face aux libéraux qui vont motiver mon entrain.

Je déplore cette loi outrancière autant que ces actes de vandalisme dans la ville qui font beaucoup de tort aux commerçants et qui vont sûrement nuire aux nombreux  festivals d’été.

Je suis dans un « no man’s land » et ma boussole est déréglée. Je cherche un nouveau René Lévesque.

mardi 15 mai 2012

Le réveil


Pastel d'après une peinture de Josée Gauthier 

Le réveil

Laissons l’âtre mourir; courons à l’aventure
Le brouillard qui s’élève est largement troué
La fontaine reprend son murmure enjoué
La clématite grimpe à chaque devanture

Le ciel fait ondoyer les plis de sa tenture
Une tiède vapeur monte du sol houé
L’air doux est plein de bruit; les bois ont renoué
Dans les effluves chauds, leur discrète ceinture

L’aile gaiement s’envole à l’arbre ou pend le nid
L’enfant rit, le vieillard n’a plus de tons acerbes
Les insectes émus s’appellent sous les herbes

Ô le joyeux réveil! Tout chante, aime et bénit!
Un élan pousse à Dieu la nature féconde
Et le rire du ciel s’égrène sur le monde

Léon-Pamphile Lemay

mardi 8 mai 2012

L'été




L’été

La mousse
Épaisse
Et douce,
Au pied d’un arbre énorme…

Était-ce
Un chêne ? Était-ce un orme ?
Je l’ignore – et tant pis !

La mousse
Épaisse
Et douce
À mes reins offrait un tapis.

Et, pendant une heure et demie,
Parmi
Tant de petits amis,
Papillons, mouches et fourmis,
Sous ma tête ayant mis
Mon bras un peu plié,
Au pied de l’arbre, j’ai dormi.

(C’était peut-être un peuplier.)

Aucune feuille ne bougeait,
Parmi celles qui m’ombrageaient.
Au-dessus de moi ramageaient
De petits geais.
Était-ce un nid qu’ils ravageaient
Et partageaient ?
Sans doute, car sur moi neigeaient
Des plumes que l’on dérangeait…

Et je songeais…
Et je m’interrogeais :
Il est facile, en vérité,
D’évoquer le printemps, l’hiver
Et puis l’automne en quelques vers…
Mais, comment évoquer l’été ?

Pour l’hiver n’ai-je
Point la neige ?
Surface ou bien linceul poli
Thème inépuisable et joli – ?

Pour le printemps, c’est autre chose :
J’ai l’Amour, le lilas, le renouveau, la rose…

Et, pour l’automne, j’ai la mort,
Et la tristesse et le remords…
Et j’ai la tombe…
Et j’ai la feuille aussi qui tombe…
Oui, mais – l’été ?

Oui, comment évoquer l’été ?

Vite, il faut mettre de côté
La chaleur et le ciel d’argent,
Et l’immobilité
Des choses et des gens.
Cela n’évoque pas l’été.

Mais alors, qu’est-ce ? En vérité,
C’est moins que peu de chose et ce n’est presque rien,
C’est minuscule, aérien,
C’est, dans l’espace,
Le petit sifflement d’un moustique qui passe !

Sacha Guitry

mardi 1 mai 2012

Emmurée



(Ce texte était ma participation à Miletune)

Emmurée

Elle oublie, depuis quelque temps, elle oublie
Elle tourne en rond dans la maison
À la recherche de ses oublis
Son entourage se pose des questions

Elle range les choses à la mauvaise place
Oublie le repas sur le feu
Ses erreurs la glacent
Souvent elle pleure, son mari est malheureux

Comme elle appréhende sa dérive
De plus en plus elle se terre
Et cache dans une dernière tentative
Ce mur qui se referme sur elle

Et toujours, le mal progresse
Ses paroles ne répondent plus aux questions
Un moment de lucidité et c’est la détresse
Pour son esprit, la dissolution

Elle ne verra pas grandir ses petits-enfants
Ne pourra plus apprécier les beautés de la vie
Emmurée dans son corps vieillissant
Quelle terrible maladie que de perdre l’esprit